Alain rentre à Kinshasa pour rendre visite à ses parents qu’il n’a pas vus depuis plus d’une décennie. Tout heureux, il se présente lundi 14 février au comptoir d’Air France à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle afin de faire enregistrer ses bagages à l’avance pour le vol du lendemain. Réponse de l’agent de la compagnie : «Ce n’est pas possible ! » En effet, Alain, qui a déjà eu ses trois doses de vaccin, a effectué un test PCR le matin même, mais n’a pas pu obtenir encore le résultat au moment de se rendre à Roissy-Charles-de-Gaulle. Quelques heures seulement après, cette situation a cessé d’exister. Et pour cause, le gouvernement a annoncé, en milieu de soirée, la fin du test obligatoire pour les voyageurs complètement vaccinés. Ce qui est le cas d’Alain. Mardi matin, quand il s’est présenté à nouveau devant une hôtesse d’Air France, le résultat négatif, qui a fini par lui parvenir, n’a plus servi à rien pour embarquer sur un vol à destination de Kinshasa.En effet, à la suite d’une réunion du Comité multisectoriel de lutte contre la pandémie de Covid-19, présidée par le chef de l’Etat Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, tenue le 14 février, le gouvernement a annoncé, le jour même, la levée du couvre-feu sur toute l’étendue de la RDC, à l’exception des provinces sous état de siège (Nord-Kivu et Ituri), ainsi que la suppression du test Covid-19 à l’entrée du territoire national pour tout voyageur complètement vacciné et à l’intérieur du pays.
La levée de ces mesures restrictives, en vigueur depuis près de deux ans, a fait la joie des populations et de nombreux acteurs économiques, notamment des petits patrons et travailleurs du monde de la nuit, qui ont connu des situations dramatiques. « Des millions de personnes ont été négativement impactées par le couvre-feu décidé par le gouvernement central. Son maintien mettait aussi en danger de précarité beaucoup de ménages, souligne-t-on à Kinshasa.De plus, une telle mesure ne se justifiait plus eu égard à la baisse de nouveaux cas de Covid, notamment dans la capitale ». Le ministre de la Santé, Jean-Jacques Mbungani, a déjà souhaité la fin du couvre-feu. Puis son homonyme, Jean-Jacques Muyembe, a donné des nouvelles rassurantes du front. Chercheur, responsable de l’Institut national de recherche biomédicale (INRB), ce dernier est le bras séculier de l’Etat dans la lutte contre toutes les pandémies, à commencer par le coronavirus. Selon lui, il n’y a plus grand monde dans les hôpitaux présentant un cas grave de Covid. Le virologue prévient cependant qu’une nouvelle vague pourrait survenir entre avril et juillet en raison notamment du basculement vers la saison sèche. Celle-ci s’accompagne en principe d’une baisse des températures nocturnes et matinales. Ce qui favorise alors la propagation des virus. « La levée du couvre-feu ne signifie nullement la fin de la pandémie. Les gestes barrières et les autres mesures restent de stricte application », a d’ailleurs prévenu le gouvernement.Mais, pour l’heure, c’est l’embellie sur le terrain de la lutte contre le Covid. La situation sanitaire s’est en effet nettement améliorée, les indicateurs virant les uns après les autres au vert.
Le monde de la nuit retrouve le sourire
La fin du couvre-feu illumine d’abord, comme le soleil, le visage des tenanciers de bar mais surtout les gérants de boîte de nuit. Comme en Europe, ces derniers ont beaucoup souffert, depuis presque deux ans, des restrictions imposées aux « ambianceurs » de Kinshasa. Le monde de la nuit a retrouvé, depuis lundi soir, le sourire. D’autant que cela tombe aussi un 14 février, jour de la Saint-Valentin. Mais n’ayant pas été prévenus à temps, certains patrons de boîte de nuit n’ont pas ouvert les portes de leurs établissements. Seuls les bars notamment ceux de la commune de Bandal, mais aussi ceux situés à l’intérieur de grands hôtels kinois, tels le Pullman, le Rotana ou le Fleuve Congo hôtel, ont pu jouer les prolongations. Une aubaine pour les amoureux soucieux de faire la fête jusqu’au bout de la nuit. Dès mardi, d’autres métiers ont, eux aussi, profité de la liberté retrouvée. C’est notamment le cas des videurs de boîte de nuit, des vigiles, des taximen, etc. Durement frappées, elles aussi, par le couvre-feu, les prostituées ont également remis leurs bas résilles et autres tenues affriolantes pour aguicher leurs clients partis voir ailleurs ou étaient en hibernation. Les magasins, les maquis, les gargotes et les stations-service peuvent à nouveau ouvrir jusqu’à des heures tardives. Et ce, pour le bonheur des consommateurs et des automobilistes. Ces derniers éviteront ainsi de tomber en panne sèche sur la route après 22h. Un regain d’activités nocturnes est inévitablement attendu de la levée immédiate du couvre-feu. Les groupes musicaux ainsi que les brasseurs locaux vont, eux aussi, tirer parti de la fin des restrictions liées à la circulation des « ambianceurs » kinois. Alors « Rendez-vous ce soir chez Fatimata », comme le dit la chanson du groupe Las Maravillas, pour danser jusqu’à l’aube.
La Rédaction