Mauritanie Présidentielle

Le président mauritanien, Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani, part favori.

Peu de suspense

Elu à la tête du pays en 2019, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani devrait être reconduit dans ses fonctions pour un deuxième mandat.

Quelque 1,8 million de Mauritaniens sont appelés aux urnes ce 29 juin pour le premier tour de l’élection présidentielle. Ils auront le choix entre sept candidats, dont le chef de l’Etat sortant, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani. Parmi les six autres candidatures retenues par le Conseil constitutionnel figurent notamment celles du militant des droits humains, Biram Ould Dah Ould Abeid, arrivé deuxième lors de la présidentielle de 2019 avec 19% des voix, et de Hamadi Ould Sid’El Moctar, leader du parti islamiste Tewassoul, premier parti d’opposition avec onze députés à l’Assemblée nationale. Mais, pour beaucoup d’observateurs et analystes, les dés semblent déjà jetés et l’homme à la tête du pays depuis 2019 part grand favori.

D’ordinaire discret et peu bavard, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, 67 ans, est sorti ces derniers temps de sa réserve en s’affichant lors d’inauguration de plusieurs réalisations, ou en visitant de grands chantiers d’infrastructures en cours, comme celui des champs gaziers dont la mise en exploitation pourrait, selon le Fonds monétaire international, faire tripler le PIB mauritanien dès 2025. Le 30 octobre 2023, pour la première fois depuis son arrivée au pouvoir, le président candidat a donné une interview à des médias nationaux pour défendre son bilan. Selon lui, sa politique économique a permis au pays de renouer avec la croissance, passée de 0,9% à la fin de 2020 à 6,4% en 2022 malgré l’impact de la pandémie de Covid-19 et la guerre russo-ukrainienne, de réduire le taux d’endettement extérieur et de renforcer la confiance des partenaires et des investisseurs. Sur le plan social, M. Ghazouani a mis en exergue l’instauration de la couverture maladie universelle, la lutte contre la pauvreté et les inégalités en dotant la Délégation à la solidarité nationale et à la lutte contre l’exclusion d’un budget de 500 millions de dollars. Autre bon point au tableau du président sortant : la sécurité. Alors que le jihadisme se propage partout au Sahel, et au-delà, la Mauritanie n’a plus connu d’attaque depuis 2011. Une stabilité à porter au crédit du président mauritanien, officier de formation, qui fut, avant d’accéder à la magistrature suprême, chef d’état-major, directeur de la Sûreté nationale et ministre de la Défense.

Incontestablement, le candidat d’El Insaf, le parti présidentiel, a plusieurs longueurs d’avance sur ses adversaires dont la plupart ont peu de poids. Nombre des grandes figures de l’opposition ont rallié le parti au pouvoir, ou ont disparu de la scène politique depuis les élections législatives, régionales et municipales de mai 2023, où la mouvance présidentielle a remporté la grande majorité des 238 conseils municipaux, et a raflé 107 des 176 sièges à l’Assemblée nationale, alors qu’elle ne disposait que de 93 élus dans la Chambre sortante. Mathématiquement, rien ne peut empêcher Mohamed Ould Ghazouani, qui assure par ailleurs la présidence tournante de l’Union africaine en 2024, d’être reconduit dans ses fonctions. Cette seconde candidature, a-t-il indiqué, répond à « l’appel du devoir et la volonté de continuer à servir le pays, en consolidant les acquis importants réalisés ». Affirmant que son objectif premier, au cours de son prochain mandat, sera d’affermir « l’unité nationale », de travailler à « l’intégration des couches vulnérables », et de continuer à lutter contre les « pratiques de gabegie, de corruption ou de détournement des deniers publics ». Il devra aussi répondre aux nombreuses attentes de la jeunesse, notamment en matière d’emplois. Selon les estimations, le chômage touche aujourd’hui près d’un jeune Mauritanien sur trois (31%). Une situation qui a pour corollaire une immigration clandestine de plus en plus massive des jeunes vers l’Occident.

Lamine Kane