«Quand le bâtiment va, tout va», entend-on souvent. Or ce secteur dépend aussi d’un facteur de production indispensable : le ciment. Il en a été question hier (jeudi 28 novembre) à la cité de l’Union africaine, à Kinshasa, lors de la rencontre entre le président Félix Tshisekedi et les cimentiers localisés dans la province du Kongo central. L’initiative de cette rencontre émane notamment du directeur général de la cimenterie PPC Barnet, Leny Ilondo. Avec ses collègues de la Cimenterie du Kongo (Cimko) et de la Cimenterie de Lukala (Cilu), ils sont allés présenter au chef de l’Etat leurs investissements, qui s’élèvent à 700 millions de dollars, la capacité de production installée dans chacune des trois cimenteries, leurs atouts techniques ainsi que les réserves de matières premières (calcaire à ciment, latérite, argile et sable) entrant dans la fabrication du clinker. A la présidence de la République, ce rendez-vous a été préparé en amont par le conseil spécial en charge des investissements, Jean-Claude Kabongo, et l’ambassadeur itinérant, Nicolas Kazadi. Etaient également présents : le Premier ministre, Ilunga Ilunkamba, le ministre des Finances, José Sele Yalaghuli, ainsi que ses collègues Acacia Bandubola Mbongo (de l’Economie), Julien Paluku (de l’Industrie) et Jean-Lucien Bussa (du Commerce extérieur).
Les cimentiers ont également profité de cette rencontre pour soumettre à Félix Tshisekediun mémorandum, dont Enjeux africains a obtenu une copie. Le Comité professionnel des cimentiers (CPC), membre de la Fec, le patronat local, insiste notamment sur la lutte contre la fraude liée aux importations pénalisant la production nationale. « Avec un marché étroit, nous sommes confrontés à une sous-utilisation de notre capacité de production. Qui plus est, les avantages fiscaux, qui nous ont été accordés, sont de loin peu incitatifs par rapport à ceux offerts dans les pays voisins », accusent les industriels du ciment. Avec une telle fiscalité se pose donc la question de la compétitivité des industries locales. Autre préoccupation : le crédit de TVA détenu par les cimentiers depuis 2014. Il atteint 20 millions de dollars pour PPC Barnet et 19 millions pour Cimko, affectant bien évidemment leur trésorerie. « Nous avions apprécié les efforts de l’ancien directeur général de la DGI [direction générale des impôts] pour engager les remboursements, mais la Banque centrale du Congo ne réagit pas», semble regretter le CPC.
Pour sa part, le président a demandé à chaque ministre de répondre aux préoccupations des cimentiers. «Pour une première rencontre, je l’ai trouvé humble, pragmatique et proactif, confie Leny Ilondo. Il a posé des questions pertinentes avant de donner des orientations claires en direction des ministres.» Et d’ajouter qu’une réunion a eu lieu, dès ce matin, au ministère de l’Economie. Il en est ressorti une stratégie et un plan d’action en faveur des cimentiers. Une action devrait, par ailleurs, être menée ce lundi, 2 décembre, contre les fraudeurs. Et ce, en application des dispositions légales et réglementaires. Puis une autre réunion est prévue le lendemain au ministère des Finances. Dans leur mémorandum, les cimentiers ont, en outre, fait vibrer la corde sensible de leur interlocuteur en soulignant : « La vision du président ne peut se matérialiser qu’avec la contribution d’un ciment de qualité.» Ce qui revient à dire que Félix Tshisekedi s’aiderait soi-même en répondant à leurs doléances.
Jean-Mathis Foko
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