Ce n’est pas encore officiel, mais le principe a été acté il y a quinze jours. La République démocratique du Congo (RDC) devrait recevoir, selon une source proche du dossier contactée par Enjeux africains, l’équivalent de 25% de sa quote-part au FMI, soit une enveloppe de 363 millions de dollars pour faire face aux effets de l’épidémie de coronavirus. Il s’agit en fait d’un prêt à taux zéro au titre de la Facilité de crédit rapide, comme octroyé auparavant au Sénégal et au Ghana. L’annonce d’une telle décision devrait intervenir ce lundi 20 avril à l’issue du conseil d’administration de cette institution basée à Washington.
Cela va représenter une véritable bouffée d’oxygène pour le gouvernement congolais dont les finances sont exsangues. L’intégralité de l’intervention attendue ira en appui budgétaire, du fait des circonstances exceptionnelles liées à l’impact de la pandémie de coronavirus. En effet, les concours du FMI sont d’ordinaire des appuis à la balance des paiements. L’essentiel de cet appui budgétaire dont le décaissement sera immédiat devrait donc permettre à l’Etat congolais de mieux contrer les effets de la crise sanitaire et ceux de la crise économique qui se profilent à l’horizon. Selon une source qui a suivi les négociations, le FMI « insiste sur la nécessité d’annoncer des mesures de contrôle du décaissement des ressources qui seront mobilisées ». En effet, les détournements de fonds publics qui sont à la une de l’actualité en RDC ne rassurent pas les bailleurs de fonds. Bien que présumé innocent, l’inculpation puis l’incarcération du directeur de cabinet du chef de l’Etat depuis le 8 avril, reposent avec acuité la question de la gestion rigoureuse des ressources publiques. Le laxisme qui avait cours au premier semestre 2019 n’a plus lieu d’être. Kinshasa tente de montrer que les règles évoluent dans le bon sens, en envoyant à la prison centrale de Makala plusieurs patrons sommés de s’expliquer sur l’utilisation des fonds perçus dans le cadre du Programme présidentiel des 100 jours.
Le gouvernement congolais, dirigé par le Premier ministre Ilunga Ilunkamba, espère obtenir un autre soutien financier de l’autre institution de Bretton Woods. En effet, selon la même source, la Banque mondiale travaille de son côté sur un autre appui budgétaire en lien avec l’urgence sanitaire d’un montant de 200 millions de dollars. Si tout se déroule normalement, le décaissement pourrait se faire en mai prochain. A Kinshasa, on croise les doigts car cela éviterait notamment des remous sociaux rendant encore plus difficile la maîtrise de la propagation du Covid-19. Des appuis budgétaires supplémentaires pourraient émaner d’autres donateurs multilatéraux et bilatéraux, à commencer par l’Union européenne et la Banque africaine de développement. De son côté, le chef de l’Etat congolais, Félix Tshisekedi, se tient régulièrement informé de l’évolution de chaque dossier via des messages par une poignée de conseillers directement impliqués. Il lui faudra en effet détenir les moyens de relancer la machine économique qui est en train de s’essouffler avec notamment le ralentissement de l’activité dans la capitale, confinement oblige.
L’aide que reçoit la RDC passe aussi par un moratoire sur le service de la dette (intérêt + capital). Pour sa part, le FMI vient de suspendre, pour une durée de 24 mois, les remboursements prévus pour ce grand pays d’Afrique centrale, toujours considéré comme un Etat fragile. Dix-huit autres pays africains ont été retenus pour bénéficier d’un moratoire sur la dette due au FMI. Cela devrait représenter des économies évaluées à une vingtaine de millions de dollars au bénéfice de l’Etat congolais. En clair, le Trésor public n’aura pas à débourser cet argent qui aurait dû aller vers le FMI pour rembourser des prêts antérieurs. De quoi atténuer les tensions sur la trésorerie disponible en ce moment. Les pays du G20 ne sont pas en reste. Ils ont réussi, mi-avril, lors d’une réunion en visioconférence, à s’accorder, de leur côté, sur un autre moratoire sur la dette d’une quarantaine de pays africains. Et ce, après un plaidoyer de la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, et du président de la Banque mondiale, David Malpass, relayé ensuite par le président français, Emmanuel Macron. La RDC est déjà éligible à ce nouveau moratoire. Ce qui représentera, le moment venu, des économies supplémentaires non prélevées sur les maigres ressources de l’Etat. L’objectif de ce dispositif est de parvenir, dans un futur proche, à une annulation effective d’une partie de la dette due aux pays du G20.
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