Avec le démarrage, le 24 décembre, des opérations d’enrôlement des électeurs en vue des échéances électorales à venir, dont la présidentielle et les législatives de décembre 2023, et la publication, deux jours plus tard, d’une publication commune d’Augustin Matata Ponyo, Martin Fayulu et Denis Mukwege, la campagne électorale semble bien lancée.
A l’approche des échéances électorales de 2023, la carte politique se redessine. C’est déjà l’heure des grandes manœuvres politiques, avec des alliances qui se font et se défont. La première, qui se déclare, est celle constituée d’Augustin Matata, ancien Premier ministre devenu sénateur, Martin Fayulu Madidi, candidat malheureux à la présidentielle de 2018, et le docteur Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, tous potentiels challengers de l’actuel président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, à la magistrature suprême. Les deux premiers ont déjà annoncé leur candidature au scrutin présidentiel, le troisième attend que le peuple se détermine et prenne son destin en mains, avant d’accepter cette responsabilité. Mais d’ores et déjà, dans leur déclaration du 26 décembre dernier, les trois hommes font savoir qu’aucune forfaiture électorale ne passera en 2023. « En RDC, aucune forfaiture électorale ne passera en 2023 », déclarent-ils. Ajoutant qu’ « ensemble avec le peuple congolais, nous sommes plus que déterminés à défendre notre démocratie constitutionnelle ainsi que l’intégrité territoriale de notre pays ». Selon eux, la mobilisation du peuple sera « totale » pour sauver la République démocratique du Congo qui est « en danger ». Evoquant le processus électoral, qu’ils veulent inclusif, apaisé, crédible et impartial, les trois leaders exigent la levée de l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri ; la recomposition « immédiate » de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) et « urgente » de la Cour constitutionnelle — deux institutions majeures pour la validation des résultats des élections, dont ils dénoncent la composition, qu’ils trouvent du goût du pouvoir — ; le consensus autour de la loi électorale, des centres d’inscription et du calendrier électoral ; l’arrêt de l’instrumentalisation de la justice et des services fiscaux contre les candidats déclarés ou potentiels à la présidence de la République ; l’arrêt des poursuites judiciaires contre le sénateur Matata Ponyo, empêtré dans une affaire de détournement de fonds présumé. « Nous condamnons fermement l’insécurité généralisée qui gagne maintenant tout le pays et le raidissement primaire d’un régime en désespoir qui révèlent sa détermination à organiser des élections au rabais, qui lui seront favorables. Ainsi, tout candidat déclaré ou potentiel candidat président de la République est menacé et/ou terrorisé. Nous condamnons, par ailleurs, la violation ouverte de la Constitution et des lois du pays spécialement en ce qui concerne les poursuites judiciaires engagées contre certains acteurs politiques majeurs du pays dans le seul but de les éliminer du processus électoral en cours », peut-on lire dans la déclaration. Le trio a également appelé au respect de la Constitution sur les libertés d’expression, d’opinion, de manifestation publique et de réunion. Affirmant que l’actuel chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, veut rester au pouvoir avec des moyens frauduleux, Martin Fayulu, Augustin Matata Ponyo et Denis Mukwege sollicitent la communauté internationale, Union européenne et Union africaine en tête, pour l’envoi urgent d’experts des Nations unies pour procéder au monitoring du processus électoral, déjà avec les opérations préélectorales lancées, notamment l’identification et enrôlement des électeurs dans la première aire opérationnelle de la Ceni. « Il n’est jamais trop tard, dit-on ! Aussi, à cette étape essentielle du processus électoral, nous sollicitons auprès de la communauté internationale, l’envoi urgent des experts des Nations unies, de l’Union européenne et de l’Union africaine, pour procéder au monitoring tel que mené à ce jour », clament les trois hommes. Concernant les rebelles du M23, qui occupent de larges territoires du Nord-Kivu, les trois personnalités exigent la « condamnation ferme du Rwanda » par le Conseil de sécurité des Nations unies et par tous les pays épris de paix et de justice pour « cet acte d’agression contrela RDC, en violation de la Charte de l’ONU », mais aussi le « retrait immédiat » de ce mouvement terroriste du territoire congolais. Accusant le président Tshisekedi et le gouvernement de mener une « politique d’externalisation » de la sécurité de la RDC, alors que le pays est menacé d’« émiettement », de « balkanisation ». Une situation qui, selon les signataires de la déclaration du 26 décembre dernier est « le résultat d’un déficit criant de leadership et de gouvernance de la part d’un régime irresponsable et répressif ». Et de charger encore un plus la barque : « Au lieu de doter le pays d’une armée efficace (…) le gouvernement a privilégié une politique d’externalisation de la sécurité nationale à des forces étrangères et, pire, à des États à la base de la déstabilisation du pays », le Rwanda et l’Ouganda. A un an du scrutin présidentiel, tout semble indiquer que la campagne électorale est lancée sur les chapeaux de roues et l’assaut contre la citadelle Tshisekedi s’annonce rude.
Richard Ngapi (avec la rédaction)