Lors de son retour la semaine prochaine à Kinshasa, Malangu Kabedi-Mbuyi ne passera plus inaperçue à l’aéroport de N’Djili, comme par le passé. Elle revient cette fois-ci la tête ceinte d’une couronne de gouverneure de la Banque centrale du Congo (BCC), une institution phare de la République, car c’est elle qui gère la monnaie nationale. Cette mère de famille, réservée, aura droit à un accueil digne de son nouveau statut. Nommée, le 5 juillet, à la tête de la BCC et de son conseil d’administration, élargi désormais à onze membres, elle s’apprête à quitter Washington où elle a passé trois décennies. Et ce, pour revenir vivre dans son pays d’origine. Le 19 juillet sera le jour de son sacre. En effet, une cérémonie de passation de charges avec son prédécesseur, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, sera organisée dans l’imposant bâtiment abritant à la Gombe – le quartier d’affaires –, le siège de l’institution monétaire.
Mère de deux enfants, Malangu Kabedi-Mbuyi, née en 1958 à Kananga, une ville située au centre de la RDC, est titulaire d’une licence en économie et d’une maîtrise en économétrie obtenues à l’Université libre de Bruxelles (ULB). Ce qui lui ouvre les portes du Centre d’économie appliquée (DULBEA) de l’université bruxelloise. Elle y travaille pendant un an. Depuis lors, les yeux de cette femme réputée sérieuse et travailleuse restent rivés sur les grands agrégats économiques. Après la Belgique, cette économiste va beaucoup voyager, apprenant alors plusieurs langues.
Mais sa récente nomination ne fera pas d’elle une étrangère dans les couloirs feutrés de la BCC. Et pour cause, elle y a aussi passé deux ans de sa vie professionnelle, notamment au sein du département des études. Elle a ensuite rejoint, il y a trente-deux ans, le Fonds monétaire international (FMI).
Au sein de cet organisme international, elle acquiert une solide expérience, occupant des postes variés et multiples : chargée de cours à l’Institut de formation du FMI, conseillère principale auprès de l’administrateur en charge des pays africains francophones au conseil d’administration du Fonds, représentante résidente du FMI respectivement au Bénin et au Cameroun, assistante du directeur du Département Afrique, cheffe de division adjointe et cheffe de mission pour cinq pays, directrice du Centre régional d’assistance technique du FMI pour l’Afrique de l’Ouest, entre autres.
Après avoir passé 32 ans au FMI, Malangu Kabedi-Mbuyi aurait bien pu raccrocher dès cette année pour jouir d’un repos bien mérité. Mais le départ à la retraite attendra encore un peu. Maîtrisant les rouages de la finance internationale, cette haut fonctionnaire, rigoureuse, va désormais mettre son expertise au service de la RDC. « Femme exceptionnelle », selon le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya, son arrivée aux commandes de la BCC tombe au moment où Kinshasa vient de négocier un programme économique avec l’institution de Bretton Woods. D’où le recours à cette économiste compétente par le président de la République, Félix Tshisekedi, afin de donner une chance à ce programme triennal. « Qui mieux qu’elle peut aisément faciliter le dialogue avec le FMI dans le cadre dudit programme ? », s’interroge un autre membre du gouvernement. Rompue aux techniques d’analyse macroéconomique, Malangu Kabedi-Mbuyi est donc une bonne recrue pour l’Etat congolais. Cette « perle rare » devra aussi renforcer la gestion financière et opérationnelle de la Banque centrale selon les standards internationaux.
Rappelons que cette nomination d’un nouveau capitaine au gouvernail de la BCC entre dans le cadre d’une réforme en profondeur (modernisation de la structure, des ressources, du fonctionnement, etc.) de l’institution en suspens depuis fin 2018. La mise en route de cette réforme est l’une des conditions posées par le FMI préalablement au décaissement du financement triennal d’environ 1,5 milliard de dollars en faveur de la RDC. Enfin, avec Malangu Kabedi-Mbuyi, le président Tshisekedi a nommé une personnalité de son choix. Son prédécesseur, Deogratias Mutombo, a été désigné en 2013 par l’ex-chef de l’Etat Joseph Kabila. Comme le désormais ex-gouverneur, le conseil d’administration – dont certains membres siégeaient depuis 18 ans –, a été également renouvelé, comme demandé par le FMI.
La Rédaction