Covid-19 : l’exemple malgache

Lancé le 20 avril, le traitement « Covid-Organics » à base d’artemisia et de plantes médicinales malgaches peut désormais être administré dans le pays, à titre préventif et curatif. Une initiative majeure qui complète l’arsenal de mesures gouvernementales pour lutter contre le coronavirus.

Le président Andry Rajoelina

Sur fond de déconfinement, les premiers à en bénéficier de ce remède traditionnel scientifiquement amélioré seront les écoliers, afin de renforcer leurs défenses immunitaires avant de reprendre le chemin de l’école. Le Covid-Organics sera distribué gratuitement aux Malgaches les plus vulnérables et vendu à très bas prix aux autres et tous les bénéfices seront reversés à l’IMRA pour financer la recherche scientifique

L’élaboration de ce remède a été menée sous la houlette de l’Institut malgache de recherche appliquée (IMRA), à l’origine de plusieurs médicaments réalisés à partir de plantes endémiques, tels que l’antidiabétique Madéglucyl et l’antitussif Madétoxyl. Depuis sa création par le Pr Ratsimamanga, cet institut a développé plus de cinquante produits en alliant médecine traditionnelle et sciences modernes.

« Les études in vitro et in vivo de l’artemisia montrent que cette plante possède de multiples indications thérapeutiques, telles qu’anti inflammatoire, anti-infectieux, anti viral et antitussif. Nous y avons ajouté d’autres plantes endémiques de Madagascar pour assurer son efficacité. Covid-Organics sera utilisé en prophylaxie, c’est-à-dire en préventif, mais les observations cliniques ont montré une tendance à son efficacité en curatif. Des études cliniques sont en cours actuellement », explique Charles Andrianjara, directeur de l’IMRA. Ses conclusions favorables constituent une avancée significative et une piste thérapeutique prometteuse, alors que 39 malades ont été guéris grâce à ce traitement et que le pays ne recense aucun décès lié au Covid-19 à ce jour. Elles ouvrent ouvre la voie à une reconnaissance par des équipes de recherche internationales.

À circonstances exceptionnelles, protocole exceptionnel

Cette initiative clé découle de l’effet conjugué du buzz médiatique autour du potentiel de la chloroquine (antipaludique notoire) dans le traitement du Covid-19, du large recours aux plantes médicinales sur la Grande Ile et des résultats concluants de l’étude des chercheurs de l’IMRA. Elle a aussi été encouragée par une lettre de la vice-présidente de la Maison de l’artemisia, à Paris. Dossier à l’appui, la fondatrice de cette association à but humanitaire représentée dans 23 pays africains, dont Madagascar, a appelé la quasi-totalité des gouvernements africains à pratiquer des essais cliniques basés notamment sur cette plante médicinale, présente en grande quantité sur le sol malgache et connue pour ses propriétés contre le paludisme et la fièvre.

Une dizaine d’entre eux– dont la RDC, la République centrafricaine, le Rwanda, la Côte d’Ivoire, le Bénin et Madagascar – ont répondu par l’affirmative. Mais pour l’heure, seul Madagascar peut se targuer d’avoir mené à terme un essai clinique, permettant de réaffirmer l’efficacité d’un traitement associant l’artemisia à d’autres plantes issues de la pharmacopée malgache. Andry Rajoelina est le premier président à avoir osé officialiser un traitement à base d’artemisia alors que l’OMS en déconseille l’usage, soupçonnant un risque de résistance de Plasmodium Falciparum dans le cas d’un traitement antipaludéen. Mais à circonstances exceptionnelles, protocole exceptionnel… Utilisé depuis plus de 2000 ans comme antipaludéen en Chine, la plante médicinale y a récemment été utilisée pour lutter contre l’épidémie de coronavirus.

Mesures fortes

Cette approche thérapeutique s’ajoute à une série de mesures fortes contre le Covid-19 adoptées par le gouvernement. De fait, à défaut d’avoir les moyens suffisants pour faire face à la propagation du virus, l’Etat a très tôt multiplié les mesures de prévention, avec succès. Une campagne de sensibilisation a ainsi été menée dans les écoles en amont de l’apparition du premier cas importé, le 20 mars. Puis, sur fond d’état d’urgence sanitaire décrété le 21 mars, le confinement a été imposé dans les trois principales villes du pays, Antananarivo, Toamasina et Fianarantsoa. Le 23 mars, le Centre opérationnel de commandement Covid-19 a été inauguré à Ivato pour coordonner les différentes mesures à appliquer afin de maîtriser la propagation du virus. Le nombre de brigades constituées de forces de l’ordre, d’agents de santé et psychosociaux chargées de lutter contre la propagation de la pandémie a alors été augmenté. Equipées de véhicules avec GPS, ambulances et cliniques mobiles afin de surveiller l’état de santé et le confinement des personnes placées en quarantaine, ces brigades assurent le contrôle d’un millier de personnes par jours et constituent un modèle du genre sur le continent.

« Dès l’apparition de ce virus dans le monde au mois de janvier et la confirmation des premiers cas sur le territoire Malagasy, l’Etat a immédiatement pris toutes les mesures de prévention qui s’imposaient et déployé une stratégie claire et organisée pour éviter la propagation du virus, rappelle le président Rajoelina. Mon devoir est celui de protéger la santé et la vie de tous les Malagasy et de toutes les personnes présentes à Madagascar. Et je ne ménagerai aucun effort pour cela. » Une détermination qui explique que le pays soit resté au stade 1 de la pandémie.

 >